Cher journal, j’écris aujourd’hui sur ta première page et je vais te raconter moi.
By Soibra Mohamed | From : Marseille, France | School : College Jacques PrevertCher journal, j’écris aujourd’hui sur ta première page et je vais te raconter moi.
Je m’appelle Soibra Mohamed, je suis comorienne et je vis à Marseille.
Tout commence dans ma petite île chérie, plus précisément dans le village où Mariama Mdrenda, ma grand-mère accoucha le 20 mars 1960 d’une fille, ma mère, Saida Moussa.
Saida a grandi dans la première maison faite en brique du village. Cette maison c’est mon arrière-grand-père qui l’a construite en 1958. C’est lui qui, le premier, est allé en France en 1950. En fait Il a ouvert la voie.
En 1976 ma mère s’est mariée au Comores à l’âge de18 ans. Son mari avait l’âge de sa mère. C’était un mariage arrangé bien entendu. C’est pour rejoindre son mari qu’elle est allée en France. 3 enfants sont nés mais elle a très vite divorcée.
Peu après, elle s’est mariée avec mon père dont elle a eu 4 enfants : Said, Amir, Assafi, Natidja et moi Soibra.
Après leur divorce, Ma mère nous a élevés seule, dans la culture Musulmane et Comorienne. Mais nous sommes quand même une famille multiculturelle. Par exemple, mon cousin préféré, Nasser, s’est marié avec une femme d’origine chinoise, Nathalie, qui est devenue ma cousine préférée. Ils ont deux très beaux enfants : Jade et Ebène.
Cher Journal, Il est important pour moi que je te parle de MES mères, oui mes DEUX mères. Elles sont sœurs et ce sont les piliers de ma famille. Elles ont leur caractère propre et elles sont uniques. Je les aime beaucoup ! Ma préférée c’est ma tante Zahara Moussa. Elle est un peu plus jeune que ma mère. Elle pense comme ma mère mais sans ses défauts.
C’est la meilleure, je l’aime de tout mon cœur. Elle vit à Aix en Provence. Je n’ai jamais eu le courage de dire à ma tante combien je l’aime énormément. C’EST ELLE, MON PILIER. Mais pour toute ma famille le pilier c’est ma mère.
En effet, chez moi c’est le QG de la famille. Pour les fêtes, les réunions familiales, ou même sans raisons tu seras toujours le bienvenu. Pour l’Aid, c’est chez moi que ça se passe. Tout le monde le sait, on n’a pas besoin de se le rappeler ! Depuis que ma mère est en France c’est comme ça.
Ma mère me construit jour après jour. Grâce à elle, je n’aurais pas pu être en France, je ne parlerais pas français et je ne serais peut-être pas aussi capricieuse (comme ils disent) ou je n’aurais peut-être pas l’habitude de ce confort que j’ai par rapport à ma famille aux Comores.
Ma mère et mes tantes m’ont appris beaucoup depuis ma naissance. Elles m’ont éduqué d’une très bonne manière, et j’éduquerai mes enfants dans ces mêmes valeurs. J’ai grandi dans le respect, le partage et ma religion m’a beaucoup aidé.
Et surtout MON PAYS !! Les Comores. C’est pour moi une fierté d’être comorienne. Toute ma vie j’ai baigné dans la marmite de Pilaou, (Plat comorien) de Madaba, (Plat comorien) de banane plantain, de Maele Nazi et de patates douces, tous ces plats que je pourrais manger tous les jours.
J’aime encore plus mon pays depuis que j’y suis allée cet été pour la première fois. Je pensais que c’était la campagne mais non ! Ya même la 3G là-bas !!!!!! C’est trop trop trop bien. Quand on me parle des Comores, je revois les palmiers, les mangues, la mer et le soleil.
Je me rappelle de ces odeurs si particulières, si douces et de ces gens si généreux. C’est ma vie. Voilà en quoi ma mère me construit, elle est très attachée aux coutumes comoriennes comme moi. Je me sens enracinée à mon pays.
Depuis mon retour des Comores, mon île me manque. A chaque fois que j’y pense j’ai envie d’y retourner. Quand je serai grande, j’irai là-bas tous les étés avec ma famille OBLIGE !! En plus là-bas il y a ma grand-mère que j’aime beaucoup beaucoup.
Mais je n’ai pas seulement un côté comorien. J’ai aussi un côté français. J’aime beaucoup mon pays d’origine, mais je ne pourrais pas y vivre. Et oui ! J’ai grandi ici, je ne pourrais pas vivre sans électricité, sans eau courante. Sans parler du médecin, les gens ne peuvent pas se permettre d’y aller facilement car cela coute cher là-bas.
Là-bas je ne voulais pas sortir sans mon cousin parce que tous les hommes me regardaient avec INSISTANCE. Ils savaient tous que je n’avais que 13 ans, mais ils n’en avaient rien à faire. Le plus vieux avait l’âge de mon père ! J’aurais préférée être transparente comme en France.
Mais surtout au début je ne connaissais que les gros mots en comorien. Et je ne pouvais pas parler avec ma grand-mère qui ne savait pas parler français. J’étais vraiment dégoûtée. Toute ma vie j’ai parlé d’elle, je l’aimais à distance. Et une fois devant elle : RIEN. J’étais trop triste.
Mais heureusement que pendant ces 3 mois j’ai appris le comorien ! Et grâce à ça j’ai appris beaucoup sur ma mère et de mes tantes. Bien sûr les fous rires étaient au rendez-vous.
Il y a aussi la question des vêtements ! On a tous besoin de notre dose de shopping quelques fois. Et là-bas de ce que j’ai vu, il n’y a rien qui me plaisait. Au Comores, les filles s’habillent comme leurs mères ! Les mieux habillées sont celles qui ont des habits qui datent d’au moins 5 ans. Et si j’avais cassé mes lunettes comment j’aurai fait ! Les seules lunettes que j’ai vues sont de vieilles Ray-Ban d’ingénieurs comme je les appelle. J’aurais trop de mal à me séparer de mes Chanel.
Il y a beaucoup de choses qui me différencient de mes cousins et cousines. Par exemple un truc simple LE GOUTER !!
Moi je suis obligée de prendre mon gouter à 4h. Quand il était 4h je disais à mon cousin Adil « viens on va au magasin ! ».
Il me disait toujours : « mais pourquoi tous les jours à la même heure, tu veux qu’on aille acheter des gâteaux ? » Ça me faisait trop rire.
Il y a aussi un autre truc. Dans la maison les enfants n’ont pas le droit de s’assoir dans le salon parce que le salon c’est que pour le père et la mère. Pourquoi ? Je ne comprendrai jamais. Je trouve ça trop bizarre mais pour mon cousin et pour tout le monde c’est normal. Le père a même c’est toilette perso !!!!!
Il y a un autre truc que je ne supporte pas !! En fait, aux Comores on ne peut pas dormir la journée. Il y a toujours quelqu’un pour dire Hodiii.
C’est quand quelqu’un rentre chez toi. Pour te prévenir il dit Hodi et toi tu dois dire Karibou ça veut dire bienvenu, genre en gros tu peux rentrer
Et là-bas si tu fermes la porte de chez toi a clé, t’es soit fou soit malade. Il faut toujours la laisser ouverte. Ché pas, imagine je sors de la douche et je suis en serviette. Je fais comment pour aller jusqu’à la chambre ? Et si la serviette tombe tout le village n’est pas obligé de me voir à poil !!!! Le pire c’est que si on ferme la porte, ils regardent par la fenêtre pour voir s’il y a quelqu’un ! En sachant que je n’ai pas de volet chez moi au Comores !! On a même plus d’intimité quoi !! Alors qu’en France c’est naturel de fermé la porte à clé.
Je suis Soibra Mohamed j’ai 13 ans et je suis Franco-Comorienne.